Guerre et paix

On les entendait à la ronde, ces rythmes orientaux qui s’engouffraient, déformés, dans les ruelles pavées. Effet tuyau et tubes inconnus. Sur la place, c’était un attroupement légèrement dispersé, devant une toute petite scène sur un camion. Quelques femmes vraiment très maquillées arboraient des costumes traditionnels – dentelle autour du visage – sous la grisaille humide de cette fin d’après-midi de fin d’hiver. Les hommes bras dessus bras dessous piétinaient une danse, solennellement, qui se voulait joyeuse sans grande conviction. C’était le Nouvel An kurde, dont la communauté vivait maladroitement, à fond les ballons, mais sans l’air d’y toucher, un sentiment d’appartenance éloigné. Ou l’intrusion de la guerre dans l’insouciance d’un pays dont les passants semblaient blasé par la paix.